Chapitre 7 : La Vélane et l’Héritier
Le bruit de l’agression s’était très vite répandu et tout le monde ne parlait plus que de ça. Lorsque les élèves revinrent de leurs vacances de Noël, ils se trouvèrent accablés par la terrible nouvelle et certains parents demandèrent à être reçus en entretien par le directeur Dippet, s’inquiétant pour la sécurité de leurs enfants.
Pourtant, les esprits des adolescents furent bientôt occupés par une autre surprise de taille que leur réservait l’administration de Poudlard. En effet, un matin, une grande feuille avait été punaisée sur les panneaux d’affichage des différentes salles communes. Dessus, un couple, dessiné au crayon de papier, se trémoussait sur une musique inexistante. En bas de l’affiche était annoncé, en gros caractère :
« Cette année, un bal sera organisé en l’honneur d’une ancienne fête celte, Imbolc, le 2 février prochain, afin de renforcer les liens entre nos quatre maisons…
Tous les élèves sont invités à y participer. »
L’information avait fait fureur parmi les adolescentes qui s’imaginaient déjà leurs éventuelles toilettes et rêvaient à leur futur cavalier.
Cette effervescence exaspérait Eilane… Après tout, qu’est-ce qu’un bal pouvait avoir de si amusant ? Ce n’était qu’une raison de plus pour ses camarades de se pavoiser devant les garçons de l’école comme elles savaient si bien le faire !
La jeune Vélane en était déjà à la troisième invitation qu’elle repoussait hautainement, et elle commençait à en avoir assez… Pourtant, au fond d’elle-même, elle mourrait d’envie d’aller à cette soirée. Mais il semblait que la seule personne avec qui elle aurait souhaité s’y rendre ne daigne pas l’inviter. Elle savait que Tom n’aimait pas se faire remarquer en public, mais elle ne pouvait s’empêcher pour autant d’avoir un pincement au cœur en pensant qu’il ne lui avait pas même proposé de l’y accompagner. Il ne restait plus que quelques jours avant le début du mois de février et toutes les filles avaient un cavalier. Toutes sauf Eilane.
Ce soir-là, alors qu’elle se dirigeait vers la salle commune de Serpentard, elle croisa Rubeus Hagrid dans le couloir, l’élève de troisième année avec qui elle avait assisté au match de Quidditch. Celui-ci s’avança vers elle de son pas lourd. Il prit son courage à deux mains et lui demanda timidement, presque à voix basse, si elle voulait bien venir au bal avec lui. Eilane s’apprêtait à le repousser, lui aussi, avec ce dédain dont elle était parfois capable, mais elle se ravisa. Après tout, elle n’allait pas attendre indéfiniment que Tom se rappelle son existence, et Hagrid, bien que plus jeune qu’elle et quelque peu plus grand, paraissait mûr et sympathique pour son age. Elle répondit finalement par l’affirmative au garçon qui n’en crut pas ses oreilles, avant de prendre la direction des cachots de Poudlard…
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Eilane entra en trombe dans la salle commune et partit se coucher immédiatement sans jeter un seul coup d’œil vers le canapé où Tom, comme toujours, écrivait dans son petit cahier noir, à la lueur du feu de cheminée. Le jeune homme leva un sourcil interrogateur en voyant sa compagne passer ainsi, telle une furie, mais ne tenta pas de la rattraper. Nagini, quant à elle, émit quelques sifflements depuis le fond de sa boîte, exprimant sa désapprobation sur la conduite de la jeune fille.
Dans le dortoir, toutes les autres filles dormaient déjà. Eilane s’approcha de son lit à baldaquin dont elle tira vivement les rideaux. Puis elle se glissa sous les couvertures glacées. Elle était furieuse contre Tom bien sûr, mais aussi contre elle-même… Pourquoi fallait-il forcément que ce soit les hommes qui choisissent leurs cavalières ?
Alors qu’elle fermait les yeux, essayant de trouver le sommeil, des bruits de pas résonnèrent dans l’escalier. Pourtant, tous les lits étaient occupés.
A travers les voilages, elle aperçut une silhouette, grande et mince, qui restait plantée à l’entrée du dortoir. Derrière celle-ci, la porte demeurée ouverte laissait passer la lumière vacillante des quelques flammes qui dansaient encore dans l’âtre. Intriguée, la jeune Vélane ouvrit les rideaux du lit. Face à elle, toujours figé debout à côté de l’escalier, Tom attendait tranquillement.
Eilane se releva, exaspérée. Elle s’avança vers le sorcier qui la regardait d’un air réjoui.
-Je croyais que l’accès de ce dortoir était interdit aux garçons ! s’exclama-t-elle si furieusement que les deux filles les plus proches se réveillèrent en sursaut.
Pour toute réponse, Tom lui fit un signe de tête en direction de la sortie. Elle le suivit à contrecœur.
Une obscurité presque totale régnait dans la salle commune. Seules quelques braises, encore rougeoyantes, brillaient au fond de la large cheminée. Eilane avait déjà sorti sa baguette et s’apprêtait à lancer un "Lumos" quand Tom, d’un geste de la main, l’en empêcha et l’entraîna dans les couloirs de Poudlard. La jeune fille voulut protester, persuadée qu’ils se rendaient une fois de plus dans la Chambre des Secrets, et trop énervée pour se laisser aller aux petits jeux qu’elle et Tom appréciaient tant d’habitude. Mais, au lieu de bifurquer à gauche en direction des escaliers, ils tournèrent sur leur droite et franchirent la lourde porte qui menait au parc. Dehors, la nature baignait dans la lumineuse clarté d’une lune arrondie.
Chacun savait que les promenades nocturnes dans le château, tout comme en dehors, étaient formellement interdites et plus particulièrement encore depuis la terrible agression. Pourtant, Eilane se sentit rassurée de se retrouver à l’air libre, près du lac où flottait une légère brume blanchâtre.
-Comment tu as fait pour entrer dans le dortoir des filles ? Je veux dire… il y a une protection magique qui est censée empêcher les garçons d’y monter… mais toi tu as réussi à l’évincer !
-Ce n’était pas bien difficile… Ne me dis pas que tu pensais ce genre de protection inviolable ? Tu devrais être la première à savoir les faire disparaître !
-Je n’y avais jamais réfléchi à vrai dire !... Alors, tu as une cavalière pour le bal ? rajouta-t-elle un peu froidement.
Tom qui marchait à ses côté, la regarda, légèrement gêné.
-Tu espérais que je t’y inviterai, n’est-ce pas ?
-Mais non voyons ! répondit-elle en levant les yeux au ciel. Pour quelle raison est-ce que j’aurais eu cette stupide idée ? Il y a sans doute des centaines de filles impatientes de t’accompagner, peut-être même que tu as également couché avec plusieurs d’entre elles ! Alors pourquoi m’aurais-tu choisie, moi plus qu’une autre ?
Sous l’effet de la colère, elle accéléra brusquement le pas.
-Tu ne comprends pas. Si nous y étions allés ensemble, on aurait risqué des soupçons…
-Quels soupçons ? Ce serait si grave que les gens sachent que nous sommes ensembles ?
Tom, qui courait presque derrière Eilane, l’attrapa par le bras et la tira vers lui.
-Ca n’a rien à voir avec ça ! Et d’ailleurs je ne t’ai pas entraînée ici pour me disputer avec toi ! Tu devrais grandir parfois !
Eilane, exaspérée par la remarque que Tom venait de lui faire, s’apprêtait à lui répondre quand ses yeux plongèrent dans le turquoise de ceux de son compagnon. La réplique cinglante qu’elle avait préparée ne passa pas ses lèvres et, reprenant sa respiration, elle se calma un peu. Tom se rapprocha doucement d’elle. Il baissa légèrement la tête et posa sur ses lèvres un baiser fugace.
-Pourquoi tu m’as amenée ici ? interrogea-t-elle.
-Suis-moi, tu vas voir !
Eilane obéit, la mine légèrement boudeuse. Tom attrapa sa main et l’entraîna dans l’obscurité de la forêt interdite. Il faisait encore très froid et Eilane, qui n’avait pas prit la peine de s’habiller chaudement, sentait ses membres se geler petit à petit. Elle lâcha les doigts de Tom qui tourna la tête vers elle en lui lançant un regard interrogateur. Sans répondre, elle ferma les yeux. Son corps sembla s’illuminer durant une fraction de seconde et lorsqu’elle tendit à nouveau sa main à son compagnon, celle-ci était brûlante.
-Tu m’étonneras toujours ! Tu fais de plus en plus de progrès !
-Oh… Pourtant, je croyais que je devais…Comment tu as dit déjà ?... Grandir ?
Tom se contenta de sourire et Eilane ne put s’empêcher de l’imiter. Ils continuèrent de marcher quelques minutes encore, avant de se retrouver à l’orée d’une petite clairière. Tom s’arrêta soudain, Eilane fit de même. Sans un mot, il l’entraîna rapidement derrière un grand chêne. La jeune fille s’apprêtait à lui demander ce qu’ils attendaient, mais il posa un doigt sur ses lèvres afin de la faire taire et lui fit signe de regarder la clairière.
Elle ne vit d’abord rien d’autre que l’herbe et les arbres qui entouraient le lieu, puis ses yeux semblèrent s’habituer à leur présence, et elle les aperçut. Elles étaient à la fois translucides et faites d’une matière solide, sombres et lumineuses, immobiles et mouvantes. C’était comme si elles aspiraient les couleurs et les lumières de l’endroit devant lequel elles passaient. Eilane avait du mal à y croire, elle n’avait donc pas rêvé le jour du match de Quidditch, la forêt interdite abritait bien des Ombres.
-Qu’est-ce que ça veut dire ? chuchota-t-elle à l’attention de Tom tout en ayant le mauvais pressentiment de connaître déjà la réponse.
-Tu ne lis donc jamais les journaux ? Ce sont les serviteurs de Grindelwald… Les Ombres !
-Ca, je m’en doutais… Mais que font-ils ici ? Ils vont attaquer Poudlard ? s’enquit Eilane dont le regard de bronze reflétait à présent une certaine panique.
-A vrai dire, ils ne sont pas là pour Poudlard…
-Ils sont là pour quoi ?
-Tu le sauras bien assez tôt ! répondit mystérieusement Tom.
-Mais attends… Comment ça se fait que tu connaisses leur présence… et que tu sembles en savoir beaucoup sur eux ?
-Eily… parfois tu es vraiment navrante ! Qu’est-ce que tu crois, que le mage noir Grindelwald ne serait pas intéressé pour avoir l’héritier de Salazar Serpentard à ses côtés ?
Eilane ne sut quoi répondre à cela. Elle était à la fois abasourdie, et peu étonnée.
-Viens ! lui ordonna Tom d’une voix froide qui n’accepterait pas de répliques.
Eilane le suivit jusque dans la clairière et lorsqu’ils arrivèrent face aux Ombres, celles-ci s’inclinèrent devant eux. Tom se tourna face à Eilane.
-Intéressant !
-Quoi ? Qu’est-ce qui est intéressant ? demanda la jeune fille avec appréhension.
-Rien… Peu importe !
Soudain, un homme encapuchonné sortit de l’obscurité dans un crissement strident. Son visage était masqué et une aura de noirceur et d’inhumanité émanait de lui comme un poison. Eilane n’eut besoin d’aucune explication pour savoir qu’elle se trouvait face à Grindelwald. Mais ce qui la rendit nauséeuse fut surtout la terrible sensation qui l’envahissait, lui disant que cet homme avait quelque chose d’affreusement familier.
-Ah ! bien ! Je vois que tu me l’as enfin amenée ! s’exclama Grindelwald d’une voix gutturale.
Tom s’inclina devant le mage, poussant Eilane à en faire autant, mais alors qu’elle avait tout juste baissé le regard, Grindelwald s’approcha d’elle, posa l’une de ses mains rugueuse sous son menton et lui releva la tête.
-Elle est vraiment très belle ! murmura-t-il, certainement plus pour lui-même que pour complimenter la jeune fille.
Ses doigts descendirent jusqu’au torse d’Eilane et s’arrêtèrent au niveau de son cœur.
-Et très puissante ! Bien plus que je ne l’imaginais ! sourit-il, sa main toujours posée sur la poitrine de la Vélane.
Il pressa ses doigts d’avantage contre la peau de la jeune fille tout en murmurant d’étranges paroles dans une langue inconnue qu’Eilane ne put déchiffrer. Elle se sentit tout à coup traversée par un millier de petits frissonnements, comme si elle venait de prendre le courant. Sur son front se dessina un fin croissant de lune bleu qui brilla dans la nuit, avant de se dissiper aussi soudainement qu’il était apparu.
-J’ai une mission à te confier…
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Le jour tant attendu du bal arriva enfin. Pour l’occasion, les professeurs de Poudlard avaient accepté de terminer leurs cours plus tôt. Cette attention permit aux collégiennes de partir se préparer dans leurs dortoirs respectifs, tandis que les garçons, moins coquets, faisaient des partis d’échec façon sorciers ou s’échangeaient des cartes de chocogrenouilles.
Eilane, elle aussi, avait rejoint ses camarades dans la salle commune et tentait de coiffer ses cheveux qui refusaient obstinément de tenir en place. Elle avait la vague impression que quelques mèches s’étaient assombries durant les derniers jours mais ne s’en inquiéta pas plus que ça, pensant que ce n’était du qu’aux reflets de lumière. A côté d’elle, d’autres jeunes filles s’admiraient devant la glace, choisissaient un rouge à lèvre ou rajustaient leurs robes d’un coup de baguette magique.
-Vous ne savez pas la nouvelle ? commença l’une d’entre elle.
Les autres firent non de la tête et s’agglutinèrent autour de leur amie.
-Tom Jedusor va venir au bal sans cavalière.
-C’est un comble… Moi j’y serais bien allée avec lui s’il me l’avait demandée ! répliqua l’une des filles en gloussant.
-Il parait qu’il n’a invité personne ! rajouta une troisième.
-Eh bien au moins, ça veut dire qu’il n’a pas de petite amie… Qui sait, pendant la soirée, je fausserais peut-être compagnie à mon cavalier pour aller le consoler !
Eilane sourit. Si elles savaient à quel point elles se trompaient. A la réflexion, elle se fichait bien de ne pas aller au bal avec Tom, tant qu’elle passait la majorité de son temps à ses côtés.
Vers huit heures, Eilane descendit du dortoir. Elle portait une robe composée de voiles verts et violets sur laquelle était épinglée son insigne de préfet. Elle avait attaché ses cheveux qui lui retombaient sur la nuque en boucles argentées.
Se frayer un passage jusqu’à la sortie de la salle commune ne fut pas chose facile. Les élèves, dans une agitation folle, envahissaient les moindres recoins. Eilane scruta la pièce avant de s’en aller, mais elle n’aperçut Tom nulle part. Sans doute attendait-il déjà dans la grande salle.
Conformément à ce qu’ils avaient convenu, elle retrouva Hagrid dans le hall. Pour l’occasion, il avait revêtu son plus beau costume, mais la taille inhabituelle du sorcier jurait avec ses atours. Quand il vit arriver la Vélane, il lui tendit, d’une main tremblante, une fleur rouge sang qui ressemblait vaguement à une rose.
-C’est le professeur Trémière qui m’a permis d’en prendre une dans la serre.
Eilane fut touchée par ce geste et s’empressa de remercier son cavalier. Elle lui prit ensuite le bras et ils entrèrent ensemble dans la Grande Salle.
Du plafond étoilé tombaient une myriade de flocons de neige magiques et quatre immenses statues de glace, décorés aux couleurs des quatre maisons de Poudlard, ornaient la pièce. Les tables avaient été rassemblées vers le fond pour laisser lieu à une grande piste de danse.
Quelques collégiens, déjà installés, attendaient que le bal commence. Eilane fut heureuse d’apercevoir Tom, accompagné de son habituelle bande de Serpentards, dans un coin de la salle. Elle entraîna Hagrid vers eux.
En la voyant arriver au bras de ce curieux cavalier, presque deux fois plus grand qu’elle, Malefoy pouffa de rire, mais le regard noir que Tom lui lança le stoppa net.
-On devrait peut-être commencer à se placer, proposa Jedusor tout en scrutant les alentours.
Les tables, agencées pour contenir des groupes de six personnes, se remplissaient à vue d’œil.
-S’il le faut vraiment, soupira Malefoy en observant dédaigneusement Hagrid.
Ils s’assirent tous les quatre un peu plus loin, laissant les autres Serpentards avec leurs cavalières.
A l’occasion de cette soirée inhabituelle, les professeurs eux-mêmes avaient été conviés à se mélanger aux élèves. Pourtant, quel ne fut pas l’étonnement des trois adolescents quand ils virent le professeur Dumbledore et le directeur Dippet s’approcher de leur table.
-Vous permettez que l’on vienne avec vous ? demanda Dumbledore.
Personne n’émit la moindre objection et les deux adultes s’assirent à leur tour.
Dès que tout le monde fut installé, la soirée débuta et un véritable festin apparut sur les tables.
Alors que Tom et le directeur de Poudlard discutaient du club d’aide aux devoirs et de la difficulté du programme de cinquième année, Eilane, elle, tentait d’entamer la conversation avec Hagrid, qu’elle connaissait finalement assez peu.
-Alors… euh… comment se passe ta troisième année ? Tu t’en sors bien en classe ?
-Pas vraiment non… je ne suis pas très doué, tu sais… Je crois qu’à partir de la semaine prochaine, je vais m’inscrire au club d’aide aux devoirs !
-Oui, c’est une bonne idée ! On se verra là-bas, j’en fais partie… avec Tom bien sûr ! lui répondit-elle.
Jedusor, qui était toujours absorbé par le discours du directeur, se retourna à l’entente de son prénom. Son regard croisa celui d’Eilane dont les joues rougirent légèrement. Dumbledore, à qui ce détail ne semblait pas avoir échappé, laissa paraître un léger sourire derrière sa très longue barbe rousse.
-Je suis heureux de constater que tous les Serpentards ne rejettent pas systématiquement leurs camarades des autres maisons, s’exclama-t-il à l’attention d’Eilane. Ce bal a été organisé pour renforcer les liens que nous tentons de faire subsister entre nous tous, mais j’ai eu la mauvaise surprise de découvrir que la plupart des élèves s’étaient regroupés par clans ! Et je ne vous cacherais pas que les Serpentards sont les plus réfractaires à toute entente avec les autres maisons de Poudlard… C’est fort dommage !
-Oui, j’ai eu beaucoup de chance qu’Eilane accepte de m’accompagner au bal, acquiesça Hagrid. Je suis certain que pas mal de garçons de l’école doivent m’envier en ce moment !
-Je pense en effet que certains auraient aimé être à votre place !
Les yeux pétillants de Dumbledore s’étaient posés sur Tom.
Une fois que toutes les convives se furent servis au moins trois fois de chaque succulent plat, les assiettes et les casseroles vides disparurent comme par magie. Les nappes se nettoyèrent instantanément et des corbeilles de fruits vinrent remplacer la vaisselle sale.
Tandis que les conversations continuaient dans d’inlassables chuchotements, les lumières baissèrent peu à peu pour donner à la grande salle une atmosphère tamisée, propice à la danse…
Une bande de fantômes blafarde fit irruption dans la pièce et s’installa dans les airs, tout près du plafond enchanté. En bas, les derniers bruits cessaient petit à petit.
Et soudain, une voix à la fois aiguë, mélodieuse et lancinante, s’éleva dans la salle. La musique sembla arriver de nulle part mais elle accompagnait à merveille ce chant surchargé d’émotions. Ici et là, des couples se levaient de leurs chaises et se dirigeaient vers la piste de danse.
Hagrid se tourna vers Eilane.
-Tu veux bien danser ? Je ne suis pas très adroit mais j’aurais aimé au moins valser une fois avec toi durant la soirée !
Eilane n’avait que très peu envie de se retrouver sur la piste dans les bras de l’immense Hagrid mais elle jugea malpoli de refuser et accepta aussitôt. En se dirigeant vers les autres couples, elle jeta un coup d’œil à Tom qui la regardait s’éloigner, les bras croisés, avec une expression de dédain.
Hagrid n’avait pas menti en avouant qu’il n’était pas bon danseur. Il eut toutes les difficultés du monde à ne pas écraser les pieds de sa cavalière. Toutefois, il semblait s’amuser et Eilane fut contente de voir à quel point sa compagnie le rendait heureux. Malgré tout, elle se sentit soulagée de rejoindre Tom lorsque le premier morceau fut terminé.
Alors que presque une heure s’était écoulée, Jedusor se leva et s’avança vers la Vélane, mais ce fut à Hagrid qu’il s’adressa :
-Tu ne m’en voudras pas si j’invite ta cavalière à aller faire un tour sur la piste de danse ?
Hagrid lui sourit en signe d’approbation. Tom tendit le bras vers Eilane qui se leva à son tour.
Une fois sur la piste, il prit doucement la main droite de la jeune fille dans la sienne et passa son bras gauche autour de sa taille. La Vélane frissonna au contact des doigts de son amant sur le tissu léger de sa robe.
A l’inverse de Hagrid, Tom était un excellent danseur et elle se laissa agréablement porter par ses pas impeccables.
-Tu es vraiment très belle ce soir, Eily !
-Ah… parce que les autres jours, je ne le suis pas spécialement ? plaisanta-t-elle.
Tom lui sourit, de l’un de ses sourires séducteurs qui faisaient fondre toutes les adolescentes. Il rapprocha un peu plus la jeune Vélane vers lui, si bien que leurs deux corps se retrouvèrent collés l’un à l’autre. Ses yeux ne quittaient pas ceux d’Eilane.
En face d’eux, les filles de Serpentard dont elle avait entendu la discussion quelques heures plus tôt, les observaient, ahuries.
-Je t’aime, Tom !
Eilane se surpris elle-même d’avoir prononcé ces mots et s’empourpra de la tête aux pieds. Tom lui sourit, mais ne répondit pas. Le cœur de la jeune fille, qui attendait sa réaction, commençait à battre un peu trop fort.
-Je tiens à toi, Eily… Tu le sais, n’est-ce pas ?
Ce fut comme un coup de poignard…
Il évitait de répondre…
Il ne l’aimait pas, elle en avait à présent la conviction !
Elle ne dit rien, mais elle sentit sa gorge se nouer brusquement.
-J’aimerais énormément t’embrasser, mais Hagrid n’apprécierait sûrement pas de me voir lui voler la vedette ce soir… Laissons-lui donc son heure de gloire ! continua Tom, comprenant le malaise qui s’était installé entre eux.
A la fin de la chanson, il reconduisit Eilane, devenue muette, à leur table.
-Bien, il ne reste plus qu’un seul garçon de mon âge parmi vous avec qui je n’ai pas danser… Max, tu viens ?
Tom, Hagrid, Maximilius et les deux professeurs la regardèrent d’un air surpris, mais Malefoy se leva finalement en haussant les épaules et la suivit sur la piste de danse.
C’était une chanson calme, presque sensuelle et Eilane se serra tout près de Maximilius, plus qu’elle ne l’aurait fait en temps normal, sous les yeux médusés de Tom.
-Tu ne devrais pas t’éloigner un peu ? lui demanda Malefoy légèrement gêné.
-Pourquoi ? A ce que je sens, tu sembles plutôt apprécier !
-Bon sang, à quoi tu joues ? Tu veux passer pour une fille facile ou quoi ? Je croyais que tu étais avec Jedusor !
-Pour le moment, ce n’est pas avec lui que je suis ! susurra la Vélane à son oreille, avant de se retourner et de se coller contre lui tout en lançant un regard glacial à Tom qui les observait toujours.
-Viens ! murmura-t-elle à l’attention de Malefoy. Il fait trop chaud ici, j’ai besoin de prendre l’air !
Elle l’entraîna à l’extérieur du château, dans un endroit un peu à l’écart, loin des regards de ses camarades.
-Il fait vraiment froid cette fois ! grelotta Maximilius.
-Je peux te réchauffer si tu veux !
-Quoi ?... Non !
-Oh allez Max… Ne me dis pas que tu n’y as jamais pensé… Que tu n’en as jamais eu envie ?
-Non… enfin…
-J’en étais sûre ! sourit-elle.
-Mais tu es avec Tom et c’est mon ami !
-Apparemment, tu es bien le seul à penser que lui et moi sommes ensemble ! Et puis, même si c’était le cas, il n’en saurait rien ! Tu n’as pas envie de pouvoir me toucher… Tu avais l’air plutôt excité sur la piste tout à l’heure, ce serait assez frustrant si on en restait là maintenant, tu ne crois pas ?
Elle s’était rapprochée de Malefoy et se frottait doucement contre lui.
-C’est vrai que tu as des arguments assez convaincants, mais…
-Chut, murmura-t-elle en déboutonnant son pantalon. Prends-moi, tout de suite !
Une lueur démente brillait dans les yeux de la jeune fille. Maximilius ne chercha plus à s’esquiver. Sans même avoir totalement enlevé ses vêtements et sous-vêtements, ni déshabillé Eilane, il la poussa contre le mur froid du château, dégagea son sexe et la pénétra d’un coup tandis qu’elle gémissait. Il n’était pas aussi doué que Jedusor, et Eilane n’eut aucun mal à comprendre qu’elle était sans doute la "première" ! Mais lorsqu’il commença à prendre un rythme régulier et à aller et venir en elle, elle sentit son corps se réchauffer subitement et ses soupirs augmenter en intensité.
Elle aperçut soudain Tom, par-dessus l’épaule de Maximilius, à quelques mètres d’eux, qui observait la scène, un mélange de jalousie et d’intérêt dans le regard.
Elle agrippa les fesses de Maximilius et l’attira vers elle, le faisant entrer encore plus profondément dans son intimité. Les pierres du mur contre lequel elle était adossée lui gelaient le dos, mais elle s’en fichait bien en cet instant, et plus étonnant encore, elle en ressentait du plaisir. Malefoy accéléra le rythme tout en passant une main sous la robe d’Eilane, caressant ses seins dont les extrémités s’étaient durcies.
-Pince-les ! lui demanda-t-elle, croisant d’abord son regard, puis celui de Tom, plus loin, qui les observait toujours.
Maximilius obtempéra, la faisant gémir plus fort encore, tout en allant toujours plus vite en elle. Elle plongea alors intensément son regard dans les yeux bleu-gris du jeune homme. Quelques instants après, elle jouissait avant lui dans des cris de plaisirs qu’elle ne put retenir.
Avant qu’il ait eut le temps de se déverser en elle, Eilane le repoussa avec force, l’obligeant à se retirer sans attendre. Elle scruta les alentours en direction de là où se trouvait Tom plusieurs minutes auparavant, mais il avait disparu ! Elle rajusta ses vêtements, attendit que Malefoy en fasse autant et ils repartirent en direction de la Grande Salle.
-J’espère que personne ne nous a entendus ! murmura-t-elle en marchant à côté de Maximilius qui gardait obstinément les yeux fixés au sol.
Ils retournèrent s’asseoir avec Hagrid et les professeurs, mais Tom ne se trouvait pas là non plus.
-Où vous étiez passés ? demanda Hagrid naïvement.
-On était juste allés prendre l’air, se justifia Eilane et à son grand étonnement, Hagrid accepta sans problème cette explication.
La jeune Vélane, ne voulant pas froisser son cavalier, resta avec lui jusqu’à la fin de la soirée. Il s’avéra que c’était un garçon charmant, mis à part son côté parfois lourdaud, et elle commençait à sincèrement apprécier son amitié.
Un peu avant minuit, les fantômes arrêtèrent de chanter et les professeurs envoyèrent les élèves se coucher.
Eilane traîna un moment dans le hall d’entrée pour souhaiter bonne nuit à Hagrid. Puis elle se dirigea vers la salle commune des Serpentards, juste à côté des cachots de Poudlard.
Elle monta les escaliers mais ne prit pas la direction du dortoir des filles.