Chapitre 14 : Par amour
Eilane, accoudée à la fenêtre, observait le village moldu que surplombait le manoir de Grindelwald, illuminé par un brillant clair de lune. C’était l’une de ces nouvelles nuits d’ insomnies comme elle en subissait tant depuis plusieurs mois. Comprenant qu’il ne menait à rien de lutter pour trouver le sommeil, elle avait fini par abdiquer et décidé d’utiliser ces moments d’éveils en pleine nuit, pendant que les autres habitants du manoir dormaient à point fermé, pour profiter de la liberté qu’ils lui apportaient. En effet, elle ressentait de plus en plus, durant la journée, la désagréable impression d’être épiée derrière les regards des partisans de son père. Elle se doutait que Grindelwald commanditait lui-même cette surveillance mais n’en comprenait toujours pas la raison. Avait-elle fait quelque chose qui lui aurait déplu ? Il savait sans nul doute qu’elle ne l’appréciait guère mais était-ce là une raison suffisante pour se méfier d’elle comme il semblait le faire ? Elle pressentait que Grindelwald lui cachait certaines choses, certains renseignements sur les missions que ses partisans accomplissaient, Tom le lui avait ouvertement fait comprendre. Comment se trouvait-il d’ailleurs que Tom, qui se montrait si étroitement lié avec le mage noir, lui fasse si clairement cette révélation ? Beaucoup de questions hantaient les nuits de la Vélane, mais les réponses se laissaient toujours attendre.
Dans l’impossibilité d’accomplir des recherches sur quelques sujets que ce soit par manque de livres, Eilane fini par renoncer à l’idée de trouver des explications à ses interrogations et son loisir favori devint alors la contemplation des paysages environnants, car, alors qu’elle restait cloîtrée presque toute la journée, elle commençait à ressentir plus que jamais le besoin d’être en accord avec la nature. Il s’agissait de quelque chose qu’elle n’avait confié à personne, pas même à Tom, mais elle avait l’impression incessante qu’une force en elle s’était réveillé, une force ancienne, puissante et impérissable.
Eilane contempla encore une fois le village, le clocher pointu de son église s’élevant vers les cieux, ses maisons aux toits de briques rouges luisants sous la lune, sa place centrale embellie par une fontaine dont l’eau chantait nuit et jour inlassablement, le ruisseau qui sinuait autour des habitations tel un serpent miroitant, le verger rempli de pommiers qui juxtaposait la petite colline sur laquelle était perché le manoir de Grindelwald et dont émanait une odeur paradisiaque.
Un léger sourire aux lèvres apporté par tant de sérénité, elle se retourna face au lit dans lequel Tom remuait, secoué sans doute par un rêve agité.
Cela faisait une semaine qu’il était revenu de son expédition. Eilane restait persuadée qu’il savait qu’elle l’avait vu, mais elle n’avait pas souhaité abordé le sujet. Elle s’était tout d’abord sentie terrifiée à l’idée que celui qu’elle aimait, celui qu’elle était capable de suivre jusqu’au bout du monde, puisse tuer des personnes de sa propre famille avec un tel sang froid, puis elle s’était souvenue d’une discussion, à Poudlard, au cours de leur cinquième année, où Tom montrait tout le ressentiment qu’il éprouvait à propos de sa famille moldue. Elle ne prétendait pas pour autant comprendre totalement les motivations exactes de ce meurtre, ni pourquoi Tom avait soudainement décidé qu’il était temps de tuer son père et ses grands-parents, mais en fait, cela ne regardait que lui, et elle ne voulait pas entrer dans une discussion trop personnelle à ce sujet. Après tout, ne valait-il mieux pas se trouver du côté de Tom plutôt que de celui de ceux qui le contrarient ?
Eilane ne se coucha pas cette nuit là, et elle fut surprise, au petit jour, en observant le soleil se lever et en se réjouissant du chant des oiseaux qui commençaient à gazouiller dans les arbres, de ne pas être plus fatiguée.
Peu après l’heure du petit déjeuné, la Vélane et Tom furent conviés à une réunion dans le bureau de Grindelwald.
La mine renfrognée, Eilane suivit Tom dans la grande pièce aux couleurs chaudes. Grindelwald se tenait debout, non loin de la fenêtre, dans une attitude contemplative qui rappela bizarrement à la Vélane ses observations de la nuit.
-C’est un très bel endroit ici, n’est-ce pas ? murmura-t-il de sa voix caverneuse avec un étrange regard envers sa fille qui se sentit soudainement très mal à l’aise.
Elle préféra jouer celle qui n’avait pas compris l’allusion et ne répondit rien, espérant que son malaise se dissiperait.
Grindelwald, sa longue cape rouge ondulant autour de lui telle une ombre de feu, désigna alors de la main les papiers entreposés sur son bureau. Il s’agissait de divers cartes d’Angleterre, ainsi que de nombreuses photos d’une magnifique abbaye éclairée par un soleil brumeux.
-J’ai une mission pour vous deux ! affirma la mage noir. Vous allez vous rendre à Glastonbury et y rencontré le Père Goldsmith…
-Un curé ? l’interrompit Tom dont le ton évoquait la stupeur et le dédain.
-Un prêtre pour être tout à fait exact. Mais ne vous arrêtez pas à la première impression… il s’agit d’un sorcier. Cet idiot a simplement décidé de se reclure dans l’abbaye de Glastonbury, prétendant que sa spiritualité en serait décuplée.
-Glastonbury ?
Eilane venait tout juste de réaliser que ce nom ne lui était pas inconnu.
-Ce n’est pas là-bas que la légende situe l’île mythique d’Avalon ?
-Bien entendu ! sourit Grindelwald. Et c’est pour cette raison même que je désire que ce soit toi, mon enfant, qui t’y rende. Si comme l’affirme le Père Goldsmith, cet endroit possède une puissance spirituelle plus importante que la normale, alors toi seule pourra la comprendre ! Toujours est-il que je désire plus que tout voir le Père Goldsmith renoncer à ses lubies et rejoindre mes rangs. Il possède certaines connaissances en magie noire qui me seront plus qu’utiles dans ma conquête du pouvoir !
-De quelles sortes de connaissances s’agit-il ? s’enquit la jeune fille en espérant que, pour une fois, son père serait plus loquace qu’à son habitude.
Mais il se contentât de secouer la tête d’un air entendu en jetant un coup d’œil à Tom.
-Cela n’a que peu d’importance par rapport à ta mission à toi, mon enfant ! s’exclama-t-il sèchement, laissant bien comprendre à Eilane qu’elle ferait mieux de ne pas se mêler de ce qui ne la regarde pas.
La jeune fille se mordit fermement la langue pour s’empêcher de rétorquer à son père des paroles blessantes qu’elle retenait au fond d’elle depuis déjà bien longtemps.
-Donc, je dois aller à Glastonbury, trouver ce prêtre et lui demander de rejoindre nos rangs ? s’enquit-elle, une fois calmée, en répétant presque mécaniquement les instructions que son esprit avait retenu.
-C’est à peu près ça ! admit Grindelwald. Toutefois, il ne sera peut-être pas aussi facile que tu sembles le penser de rallier Goldsmith à notre cause ! Dans le cas où il se montrerait réticent, j’attend de toi que tu le convainque par n’importe quel moyen… Ai-je été assez clair ?
Un frisson parcourut l’échine de la Vélane. Il s’agissait donc d’une épreuve en quelque sorte… Si le prêtre refusait de coopérer, elle devrait utiliser la force, chose qu’elle répugnait toujours à effectuer. Même lors du meurtre de Mimi, elle n’avait fait qu’émettre l’idée du meurtre, elle n’avait pas elle-même ôté la vie, mais Grindelwald ne semblait pas s’arrêter à ce genre de détail. Il attendait de sa fille qu’elle se montre à la hauteur de son ascendance, qu’elle soit aussi cruelle que lui… Et dans le cas contraire, comment agirait-il ? Déciderait-il de se débarrasser d’elle ? Tom laisserait-il faire cela ? Tom…
Eilane sortit soudainement de sa rêverie.
-Si cette mission m’est confiée à moi, pourquoi nous avoir conviés tous les deux ? interrogea-t-elle.
Grindelwald s’approcha si près d’Eilane qu’elle du se retenir de ne pas reculer. Elle détestait le sentir aussi proche, comme s’il lui volait son espace vital. Il posa l’une de ses grandes mains rugueuses sur sa joue.
-Je préfère que Tom t’accompagne, juste au cas où tu ne pourrais t’en sortir seule… Vous partirez le plus tôt possible…Ce matin même si vous le pouvez… J’attends beaucoup de vous, ajouta-t-il d’un ton froid, dur et rauque.
Puis, comme il le faisait parfois, il disparut soudain dans un bruit strident et aigu, laissant les deux amants seuls au beau milieu du bureau.
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Le soleil atteignait tout juste son zénith lorsque Eilane et Tom transplanèrent jusqu à Glastonbury. Ils s’étaient arrangés pour apparaître un peu à l’écart du village afin de ne pas attirer l’attention des habitants et avaient décidé de faire une petite marche à pied pour rejoindre l’abbaye où ils devaient se rendre. Mais à quelques mètres de leur but, le spectacle qui s’offrit à leurs yeux s’avéra ne ressembler en rien à celui auquel Eilane s’était attendue.
-Mais… on dirait une ruine ! s’exclama-t-elle avec une moue déçue. Comment quelqu’un pourrait-il vivre dans un endroit pareil ?
-Regarde mieux…, se contenta de lui répondre Tom qui ne semblait pas le moins du monde étonné.
Eilane plissa légèrement les paupières comme si la lumière l’éblouissait et elle comprit ce que Tom voulait dire.
Sous ses yeux ébahis, les murs de l’abbaye semblèrent se construire soudain et former ce qui ressemblait au plus beau monument qu’elle n’avait jamais admiré. Elle comprit alors qu’un charme puissant protégeait le monastère contre les moldus et seuls ceux qui savaient ce qu’ils devaient y chercher voyaient l’imposant édifice tel qu’il se trouvait en réalité.
-Allons-y !
Eilane réalisa que, dans sa contemplation du lieu, elle avait arrêté d’avancer et acquiesça d’un signe de tête tout en reprenant sa marche.
Ils étaient à présent tout proche de l’entrée et elle commençait déjà à en sentir s’émaner la puissance mystique évoquée par son père.
Avant même qu’ils n’aient eu le temps de frapper ou de faire quoi que ce soit, la porte s’ouvrit en grand, les invitant à pénétrer dans l’enceinte du monastère.
-Vous voila enfin ! affirma une voix qui sembla un instant à Eilane toute droit sortie d’outre tombe, avant qu’elle n’aperçoive le prêtre, enveloppé dans sa soutane beige foncée, qui avait prononcé ces mots.
Il paraissait plus jeune qu’elle ne l’imaginait et ses yeux gris pétillait d’ardeur et de joie de vivre. Ses cheveux auburn étaient coupés courts et autour de son cou pendait le symbole de la religion chrétienne.
-Comment pouviez vous savoir que nous viendrions ? l’interrogea Eilane, se sentant incapable de cerner l’homme qui s’approchait à présent d’elle.
-Les signes n’ont jamais été plus distincts !
-Depuis quand les chrétiens parlent comme des païens ? s’enquit Tom.
-Croyez vous vraiment qu’un chrétien vivant au sein même de l’endroit où est caché l’île d’Avalon puisse prétendre à ne pas croire à certaines de ses légendes ? Ce n’est pas parce que nos croyances diffèrent que je rejette les mythes de ce lieu.
-De quels signes vouliez vous parlé monsieur ?
Eilane se sentait de plus en plus étrange, comme si ses membres se trouvaient soudain transformés en un léger coton et que son esprit se mettait à planer dans des sphères impénétrables par tout autre être humain. La voix du prêtre lui parue lointaine lorsqu’il répondit avec cette sérénité propre aux hommes d’églises.
-On m’a dit qu’un jour viendrait une prêtresse… La dernière de la lignée des dames du lac… et qu’elle aurait la capacité d’ouvrir la porte entre les mondes… C’est vous, j’en mettrais ma main à couper !
-Qu’est ce qui vous fait croire si fort que je sois cette personne ?
-Je suis un sorcier… et même si j’ai préféré la foi à la magie, je n’en ressent pas moins la puissance des personnes qui m’entourent…Vous êtes tous deux des êtres d’une très grande aura magique, mais il y a en vous, miss, quelque chose que je n’avais pas ressenti depuis des années… depuis que ma rencontre, en France, avec une jeune femme enceinte dont les pouvoirs ne pouvait venir que d’Avalon… Et à présent que je vous vois devant moi, je crois supposer qu’il s’agissait de votre mère.
-Ma mère…, répéta Eilane, troublée. Mais c’est impossible, elle est morte il y a déjà de nombreuses années, et vous êtes bien trop jeune pour…
-Votre arrivée ici ne vous a donc pas appris qu’il ne faut jamais se fier aux apparences ? Je suis bien plus âgé que j’en ai l’air… A vrai dire, si je vous disais mon âge, vous ne me croiriez sans doute pas ! J’ai été désigné par Dieu pour devenir le gardien de ce lieu et des symboles sacrés qu’il renferme il y a de cela des années… il me semble même des siècles… et la magie de ce lieu a, je crois, conservé ma jeunesse. Malheureusement, je crains que si je doive quitter un jour mon abbaye, cette jeunesse ne s’envole tout à coup !
-Vraiment ? rétorqua froidement Tom. Dans ce cas vous allez devoir vous attendre à bientôt rejoindre le rang des vieillards ! continua-t-il avec cynisme.
-Et pourquoi ça ?
Le prêtre ne paraissait pas effrayé mais quelque chose dans sa voix avait changé.
-Vous qui semblez tant en savoir, vous ignorez pourquoi nous sommes ici ? demanda dédaigneusement Jedusor.
-Je n’ai jamais dit que j’avais la capacité de lire l’avenir… Je suis un prêtre, pas un druide de l’ancienne religion !
-Vous êtes avant tout un sorcier ! affirma l’héritier de Serpentard avec toujours cette même froideur. Et vous faites honte à la communauté à laquelle vous appartenez !
-Depuis quand la foi est-elle une honte ?
-Les sorciers n’ont pas besoin de croire en de telles balivernes, comme votre religion qui rejette la magie et la sorcellerie ! Nous sommes ici pour vous ramener à la raison… Le grand mage Grindelwald a besoin de vos considérables pouvoirs et il est prêt à vous offrir tout ce dont vous désirez pour vous obtenir à ses côtés !
-La seule chose que je désire, c’est vous voir quitter mon Eglise. Je pensais sincèrement en vous voyant entrer ici miss que vous étiez celle dont on m’avait prédit la venue, mais de toute évidence, je ne pouvais que me tromper. Partez maintenant !
Tom leva les yeux au ciel et jeta un regard en direction de la Vélane. Elle entendit alors sa voix résonner dans sa tête :
-A toi maintenant !
Eilane frissonna, elle n’avait plus le choix à présent. Le curé se montrait aussi borné que son père le lui avait présenté et il lui avait confié la mission de le décider, de quelque manière que ce soit. En essayant d’effacer de son esprit l’idée que ce qu’elle faisait était quelque chose d’horrible, elle leva les mains, l’une face à l’autre, vers le ciel. Une boule de feu apparut en leurs centres et elle la jeta brusquement, avec toute la violence dont elle était capable, vers le prêtre terrorisé, qui fut projeté en arrière par le souffle de l’objet magique. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il s’aperçut que ses bras et son corps étaient emprisonné par un lasso incandescent qui lui brûlait la chaire et compressait ses poumons, l’empêchant presque de respirer.
-Par pitié, murmura-t-il, fatigué et souffrant. Je ne suis qu’un homme d’Eglise. Je ne vous ai rien fait de mal. Laissez moi !
-Acceptez vous de nous suivre et de servir le Seigneur Grindelwald ? interrogea Eilane dont la voix chantante ne collait pas vraiment à la situation.
-Je sais qui est votre Grindelwald… Il est pire que le Diable lui-même… Jamais je ne travaillerais pour lui !
-Dans ce cas…
Eilane, de la même manière qu’elle l’avait fait pour les bras et le torse du prêtre, lui encercla les jambes.
La chaleur et la brûlure se firent plus intense, presque insoutenable, mais le prêtre était prêt à tenir bon. Il ne voulait pas céder.
-Je vais être obligée de vous torturer si vous refusez toujours de coopérer !
Eilane entendit ses paroles sortirent de sa bouche avec terreur. Elle se détestait de devoir agir de la sorte, mais Tom la regardait toujours et elle savait qu’elle n’avait pas le choix.
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Quelques heures plus tard, Tom et Eilane sortaient de l’Eglise, épuisés mais soulagés d’avoir finalement réussi à faire changer d’avis le père Goldsmith. La robe, les cheveux et le visage d’Eilane étaient maculés de sang et une terrible nausée s’emparait d’elle. Incapable de dire quoi que ce soit, elle laissa Tom utiliser un sortilège de nettoyage pour lui redonner une allure plus convenable. Ils s’apprêtaient à transplaner quand quelque chose d’étrange se produisit soudain. Le soleil, jusque là seulement légèrement voilé, disparut totalement derrière une brume extrêmement épaisse qui semblait s’élever du sol. Eilane eut à peine le temps de s’apercevoir que l’abbaye avait repris son allure de ruines avant que celles-ci ne fussent ensevelies elles aussi dans la brume. Le phénomène devint encore plus étrange lorsque leur parvint aux oreilles le son d’un clapotis identique à celui que ferait l’eau sur le rivage d’un étang.
Dans la brise qui balayait le visage d’Eilane, il lui parut distinguer un chant mélodieux et attirant aux sonorités étonnement familières.
Sans savoir ce qu’elle faisait, sans se demander ce qui guidait ainsi ses pas, elle s’élança en avant, aveugle dans cette brume épaisse. Tom, inquiet, la suivit du plus près qu’il le pouvait afin de ne pas la perdre de vue. La jeune fille, d’un geste de la main, dénoua ses longs cheveux argentés parsemés de nombreuses mèches noires et les laissa danser dans le vent aux effluves salées. Muée par le désir d’aller toujours plus loin dans la direction d’où provenait le chant, elle ôta les chaussures qui entravaient ses mouvements. Ses pieds nus effleurèrent la terre et tout son corps vibra à son appel. Elle avançait, toujours plus vite, toujours plus loin, lorsque soudain, ses pieds entrèrent en contact avec la froideur de l’eau qui clapotait.
-Eilane ! s’écria Tom. Qu’est-ce que tu fais ?
Il courut pour la rattraper et découvrit alors ce que la brume lui cachait à quelques pas seulement de là… Une barque reposait au bord de l’étang, semblant attendre ses bienheureux passagers.
Sans un mot, Eilane grimpa dans la barque et alla jusqu’à sa proue, debout devant l’étendue d’eau qui la conviait. Tom monta à son tour dans l’embarcation et s’assit à l’arrière, attendant de voir ce qui pourrait bien se produire à présent.
La barque se mit alors en mouvement. Aucune rame, aucun vent ne semblait la pousser, mais pourtant, elle voguait inlassablement dans la même direction, s’éloignant toujours un peu plus du rivage. Puis soudain, sans préavis, elle s’arrêta brusquement au beau milieu de l’eau.
Comme dans un rêve, Eilane, toujours debout à l’avant du bateau, leva les bras vers le ciel dans un geste magistral. La brume, qui jusque là, avait stagné à la surface de l’eau, se mit à virevolté autour de la jeune fille comme si elle désirait lui répondre. Puis la Vélane baissa les bras autour d’elle en décrivant un cercle et la brume petit à petit s’éleva au-dessus d’elle, s’envola dans le ciel, et disparut enfin. Lorsque ses yeux purent à nouveau apprécier le paysage, Tom resta bouche bée. L’étang sur lequel ils se trouvaient ne ressemblait à aucun autre étang… à vrai dire, il ne s’agissait pas du tout d’un étang… l’odeur salée qu’ils avaient senti jusque là trouvait alors toute son explication, ils se trouvaient en pleine mer… et, droit devant eux, à quelques mètres seulement de la barque, trônait une île, ni gigantesque, ni minuscule, mais abondamment verdoyante. Nulle église, nul village ne venaient peupler les hauteurs de cette terre. Seul un majestueux monument de vieilles pierres y avait été construit et, en haut de la colline la plus proche, se dressaient vers le ciel un grand cercle de pierre.
-Avalon ! s’exclama Tom dans un murmure.
Il n’en avait entendu parler que dans les mythes, mais cette île mystérieuse ne pouvait être que celle des prêtresse.
La barque accosta lentement et Eilane en descendit, suivit par Tom, toujours ébahi. Son étonnement ne fit que s’amplifier, lorsqu’il remarqua sur le front de la jeune fille qui s’était tournée vers lui un fin croissant de lune bleu… celui là même que les prêtresses arboraient, selon la légende.
-Viens ! dit-elle d’une voix calme et mélodieuse, presque aussi envoûtante que le lieu les entourant. Nous sommes attendus !
Avant même d’avoir fini sa phrase, elle s’était retournée en direction du monument de pierre et avançait dans sa direction.
Tom fronça les sourcils mais comprit bientôt ce que sa compagne voulait dire : sur les marches de l’édifice, un très vieil homme les regardait arriver à lui. Il était tout de blanc vêtu et un ruban de tissu bleu lui ceignait la taille et maintenait une serpe.
« Un druide », pensa Tom et sa voix résonna dans l’esprit d’Eilane.
-Bienvenu à Avalon, enfant des mystères ! Cela fait bien longtemps que je t’attends !
C’était la seconde fois en peu de temps que quelqu’un semblait prévoir la venue de la jeune fille, mais Eilane ne s’en formalisa pas, la magie imprégnait l’air si vivement à cet endroit que plus rien ne pouvait la surprendre.
-Je m’appelle…
-Je sais qui tu es, l’interrompit le druide, tu es Eilane Dierna Snake, fille d’Aélia et tu es la dernière des prêtresses d’Avalon.
-Comment…
-Toi seule a le pouvoir d’écarter les brumes et de venir jusque sur cette île…
-La légende est donc exacte ? Avalon se trouve bien à Glastonbury ! murmura Eilane pour elle-même.
-Pas tout à fait… A Glastonbury se trouve une porte entre les mondes permettant d’accéder à Avalon, mais d’autres de ces portes existent ailleurs…
-Où ?
-Ce n’est pas à moi de te le dire… Tu devras le découvrir en vivant sur Avalon !
-Comment ça ?
-Ici est ta place à présent. Bénie sois la Déesse de t’avoir ramenée…
-Mais je ne peux pas rester ! s’opposa Eilane qui sentait la panique s’emparer d’elle. J’ai une vie et une famille de l’autre côté !
-Pourtant, ta destinée est de demeurer à Avalon pour servir la Déesse. Tu es la dernière descendante de la lignée des prêtresses, tu dois donc prétendre au titre de grande prêtresse et refaire vivre, grâce à ton pouvoir, l’ancienne religion !
-Dans le cas où j’accepterai, est-ce que Tom, mon compagnon, pourrait rester également ? s’enquit Eilane, évitant le regard réprobateur que son amant lui lançait.
-Non… à toi seule cette faveur est proposée… et elle ne le sera qu’une seule fois !
-Cela veut dire que si je refuse maintenant, je ne reviendrais jamais plus à Avalon ?
-Les signes ne sont pas toujours limpides, mais je crois que tu reviendras un jour, dans de très nombreuses années… toutefois il sera alors trop tard pour que tu puisse te faire sacrée grande prêtresse et je crains dans ce cas que l’ancienne religion ne s’éteigne à jamais et qu’Avalon ne disparaisse encore plus aux yeux de l’humanité qu’elle ne l’est déjà…
Eilane réfléchissait à toute vitesse. Quitter son père et sa vie en Angleterre ne lui paraissait pas vraiment déplaisant, mais elle ne pouvait se faire à l’idée de ne plus jamais revoir Tom. Bien que ses sentiments envers lui soient sensiblement ambigus, elle n’était pas prête à le laisser partir, pas prête à choisir une solitude, même sacrée, plutôt que sa présence.
-Je suis désolée… bredouilla-t-elle d’une voix défaite. Je ne peux pas…
-Je ne peux t’approuver, mais je comprends ta décision ! admit le druide. Avant que tu ne repartes, je voudrais tout de même t’offrir un cadeau, quelque chose dont tu te souviendras à ton retour d’Avalon…Suis-moi !
Eilane regarda brièvement Tom qui haussa les épaules et s’appuya contre l’un des murs de pierre en observant le druide s’éloigner dans la lande. Elle se retourna et lui emboîta le pas. Il la conduisit jusqu’à l’entrée du cercle de pierre qu’elle avait entraperçut depuis la barque.
-Pourquoi m’avoir amenée ici ? interrogea la jeune fille, interloquée par l’allure gigantesque des pierres et par le caractère sacré du sanctuaire.
-Soies sans crainte, je n’ai pas l’intention de te demandez d’effectuer un rituel ou je ne sais quoi… Je souhaitais juste pouvoir m’entretenir avec toi loin des oreilles indiscrètes de ton ami.
Eilane rougit légèrement mais ne reprit pas le vieux druide… Il n’avait pas totalement tort sur l’indiscrétion dont risquait de faire preuve Tom en reportant à Grindelwald la moindre des paroles prononcées devant lui…
-Tu ne dois pas être triste, enfant des mystères, reprit l’homme. Je sais combien la perte d’un nouveau né est toujours une tragédie pour la femme qui l’a porté en son sein, mais le bonheur frappera à nouveau à ta porte. Et tu seras mère encore une fois.
Eilane sentit des larmes monter à ses yeux et sa gorge se serra en repensant à l’atroce nuit où son fils avait trouvé la mort. Jamais elle n’avait réussi à faire totalement son deuil et l’évocation de ce malheur lui brisa le cœur. C’est sans doute pour cette raison qu’elle n’assimila pas immédiatement les paroles prononcée ensuite par le druide. Lorsqu’elle lui répondit enfin, quelques minutes déjà s’étaient écoulées.
-Vous voulez dire que j’aurais un autre enfant ? interrogea-t-elle sans réussir à masquer la stupeur dans sa voix.
-Exactement… Tu mettras au monde la plus ravissante des petites filles. Mais si je t’ai demandé de m’écouter c’est avant tout pour te mettre en garde… L’avenir de ta fille, tout comme l’était celui de ton fils, est indistinct, un danger semble planer sur elle et il te faudra tout faire pour l’épargner… La lignée des prêtresses ne doit pas s’éteindre Eilane, et c’est à toi d’y veiller, puisque tu as choisi de vivre éloignée d’Avalon !
La Vélane acquiesça d’un signe de tête, une nouvelle fois trop bouleversée pour parler.
Entre le moment où Eilane et le druide redescendirent du cercle de pierre et rejoignirent Tom, celui où ils échangèrent leurs adieux, et celui où les deux amants réembarquèrent à bord du petit bateau, qui par le même procédé magique qu’à l’allée, les reconduisit jusqu’à Glastonbury, Eilane eut l’impression atroce qu’une douche glacée tentait de la réveiller et de la sortir du rêve le plus merveilleux qu’elle pouvait faire.
Une fois qu’ils eurent accosté à Glastonbury et que la brume, la barque et l’étendue d’eau eurent disparut, il était bien plus étrange de se dire qu’une dizaine de minute auparavant, ils foulaient encore le sol de l’île mythique d’Avalon.
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Cela faisait des semaines qu’Eilane et Tom étaient revenus d’Avalon mais la jeune fille ne semblait pas pouvoir se remettre de ce voyage. Encore plus qu’auparavant, elle se sentait totalement déphasée avec les gens qui l’entouraient et l’univers dans lequel Grindelwald la faisait baigner. Pour échapper à tout cela, elle passait la plupart de ses journées au beau milieu des pommiers du verger, à réfléchir. Au fond d’elle-même, elle savait qu’elle avait eu tort de refuser l’offre qui lui avait été faite, mais son amour pour Tom était plus grand que sa raison et elle le regrettait parfois.
-Ah, tu es là !
La voix de Tom la sortit brusquement de sa rêverie. Elle se tourna vers lui et son cœur se mit à battre plus vite lorsqu’elle aperçut le visage sombre de son compagnon. Quelque chose n’allait pas !
-Qu’est-ce qui se passe ? s’étrangla la jeune fille.
-J’ai trouvé un dossier dans le bureau de Grindelwald… Il faut que tu lises ça… Ca ne va pas te plaire !
En prononçant ces paroles, il tendit à la Vélane une épaisse liasse de papiers légèrement jaunis.
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-On devrait vous accompagner… On est ses amis, il nous écoutera sans doute plus que vous !
Ginny, Hermione et Ron tentait désespérément de faire reprendre raison à Eilane, mais celle-ci ne s’était jamais sentie aussi résolue.
-Je dois y aller seule… J’ignore s’il m’écoutera ou pas, mais je préfère faire moi-même une première approche et ne pas vous exposer à un éventuel danger !
-C’est Harry, quel danger on pourrait bien courir ?
-C’est peut-être Harry, Ginny, mais il a beaucoup changé, j’en suis persuadée… et on ne sait pas ce dont il est capable à présent !
-Mais…
-Il n’y a pas à discuter, coupa Eilane, j’y vais seule un point c’est tout !
La Vélane ouvrit la porte du 12 square Grimmaurd et sortit sous le violent orage, rabattant sur son visage la grande capuche de son manteau noir.
-Si Dumbledore avait été là aujourd’hui, jamais il ne l’aurai laissé partir ! gémit Hermione en regardant la silhouette d’Eilane disparaître derrière le rideau de pluie.
-Mais Dumbledore n’est pas là ! fit remarquer Ginny. Vous croyez qu’il a renoncé à placer Harry parmi ses priorités ?
Personne ne répondit.
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Le tonnerre gronda et plusieurs oiseaux s’envolèrent subitement des arbres sur lesquels ils avaient trouvé refuge. La pluie tombait si fort que, malgré son capuchon et son manteau, Eilane se retrouva bientôt trempée de la tête au pieds.
Peu après avoir quitté la maison des ancêtres de Sirius, elle avait pris le risque de transplaner pour arriver dans cet endroit bizarre. Il s’agissait à première vue d’une simple forêt à la végétation luxuriante, mais, lorsque l’on regardait mieux, on ne pouvait pas ne pas remarquer à quel point ce lieu semblait lugubre et inhospitalier. D’immenses marécages, sombres comme la mort, s’étalaient au milieu des grands chênes tels des pièges naturels. De longs serpents se balançaient autour des branches des saules et des sapins en lançant de temps à autre des regards insistants et perçants dans la direction de l’intrus qui pénétrait leur forêt. Plus que tout le reste, ce qui rendait cet endroit si effrayant, se trouvait dans l’impression étrange d’être continuellement épié qui frappait les visiteurs jusqu’à les rendre si paranoïaque que la folie pouvait facilement s’emparer d’eux.
Eilane toutefois, avançait avec bravoure, évitant les marécage comme si elle les avait toujours connus.
-Harry ! héla-t-elle et sa voix pure et mélodieuse résonna dans l’obscurité qui augmentait d’instant en instant.
-Harry, je sais que tu es ici ! Montre-toi !
Il fallait à n’en pas douter un certain courage pour adopter ce ton impérieux dans une situation pareil, mais le visage d’Eilane ne laissa pas transparaître la moindre crainte et elle répéta son appel.
Alors qu’elle s’apprêtait à crier à nouveau le prénom de Harry, quelque chose bougea dans les fourrés derrière elle.
-Je savais que tu finirais par me répondre, s’exclama la Vélane avant de se retourner et de jaugé Harry Potter du regard. Ainsi donc mes rêves ne se trompaient pas, tu as bien pris la place de Lord Voldemort, n’est-ce pas…
Harry en effet, paraissait plus pâle et plus grand que d’habitude et une aura de magie noire émanait de lui comme un poison.
-Et qu’est ce qui vous fait dire ça ?
-Harry… J’ai été sa compagne pendant longtemps… Personne ne saurait mieux voir que moi la puissance des ténèbres dans le regard de leurs seigneurs !
-Et malgré tout, vous êtes venu me chercher ?Vous espérez quoi ? Que je repasse du côté de Dumbledore simplement parce que vous allez me le demander ?
-Et qui te dis que je vais te le demander Harry ? interrogea Eilane en souriant.
-Pourquoi seriez vous là sinon ?
-Peut-être pour te proposer mon aide !
-Ne me prenez pas pour un idiot, c’est Dumbledore qui vous a fait revenir en Angleterre…
-Les nouvelles vont vite à ce que je vois… Oui c’est vrai, admit la Vélane, Dumbledore m’a ramené dans ce pays… mais je ne lui ai rien promis en échange… J’ai juste sous entendu que je voulais t’aider à t’en sortir…
-M’aider… c'est-à-dire refaire de moi un simple gamin aux pouvoirs minuscules ?
-Je n’ai jamais dit ça ! Je ne sais que trop bien à quel point le pouvoir peut-être délicieux une fois qu’on y a goûté… Je me doute tout à fait que tu n’as aucune envie de reperdre ce pouvoir et ce n’est de toute manière pas ce que j’ai à te proposer !
-Alors vous n’êtes réellement pas là sur ordre de Dumbledore ?
-Je suis venue jusqu’à toi de ma seule initiative, Harry !
-Prouvez-le !
-Comment ?
Harry sembla réfléchir un instant, ses yeux verts balayant la vaste forêt qui les entourait.
-C’est simple, si vous êtes réellement venu à moi, comme vous le prétendez, pour m’apporter votre soutien, vous ne verrez sûrement pas d’objection à accomplir quelque chose pour moi !
-Aucune objection en effet ! l’assura calmement Eilane.
Harry leva la main droite au dessus du sol devant lui et sembla murmurer intérieurement une formule magique. Sous de sa main, sur les feuilles séchées, apparut un amas de tissu sals et malodorants. Mais avant qu’Eilane ait eu le temps de demander au jeune homme ce qu’il souhaitait qu’elle fasse d’un tas de chiffon, l’amas remua et une femme aux cheveux bruns et bouclés se dégagea de ce qui maintenant paraissait en fait être une couverture. La femme était aussi sale que l’étoffe dans laquelle elle s’emmitouflait et des larmes roulaient sur ses joues.
-C’est une moldue ! Je l’ai gardé prisonnière après l’avoir trouvé perdue dans la forêt. Je savais qu’elle pourrait m’être utile un jour ! expliqua Harry.
Eilane avait de plus en plus de mal à reconnaître en lui l’étudiant innocent qu’elle avait rencontré un an auparavant…
-Brûlez-là ! C’est bien ça, votre plus grand pouvoir, c’est le feu, non ?
Eilane acquiesça et s’approcha légèrement de la jeune fille. Ses grands yeux noisettes restaient fixés sur la Vélane et semblaient la supplier de l’épargner.
Sans lever la main, sans même bouger d’un millimètre, Eilane déclencha le feu d’un simple regard. Mais il ne s’agissait pas d’un grand feu de joie qui aurait achevé sa victime en un clin d’œil. Au début, la fille moldue ne réalisa même pas ce qui se passait, de la fumée s’élevait autour d’elle et la chaleur se faisait de plus en plus intense mais elle ne ressentit pas immédiatement la brûlure. Ensuite la souffrance survint et elle ne venait non pas de l’extérieur, mais de l’intérieur même de la jeune fille. Elle s’écroula sur le sol, incapable de rester debout plus longtemps et commença à se tortiller de douleur. Puis ses mains et ses pieds prirent feu en même temps et elle poussa une hurlement de terreur si intense, si déchirant qu’il raisonna dans toute la forêt. Le feu, que la pluie elle-même n’arrivait pas à éteindre, se propagea le long de ses jambes et de ses bras pour finalement s’étaler sur tout le corps de la victime. Une forte odeur de chaire brûlée envahit les marécages. Le spectacle fut fini en quelques secondes.
-Satisfait ? demanda Eilane tandis que les dernières flammes disparaissaient du corps calciné.
-Amplement ! acquiesça Harry.
-Tu sais, ça commence à être assez désagréable de discuter sous la pluie… Peut-être pourrais-tu m’accueillir dans un endroit un peu plus abrité ! proposa tranquillement la Vélane à qui le fait de commettre un meurtre semblait ne faire ni chaud ni froid.
-Ca peut se faire !
Harry lui tendit la main et Eilane s’en saisit. Ils transplanèrent dans la salle à manger d’ une vieille bâtisse de pierre à l’allure un peu décrépie où une grande table avait été dressée pour le repas du soir. Harry alluma un feu dans la cheminée et ajouta un couvert sur la table d’un coup de baguette magique tandis qu’Eilane séchait ses vêtements et ses longs cheveux qui avaient repris leur teinte brune en un seul crime.
Le jeune homme l’invita à s’asseoir sur une grande chaise en bois, puis lui servit un verre d’un délicieux vin blanc avant de s’attabler à son tour.
-Pourquoi, exactement, êtes vous venus me voir, miss Snake ?
-Tu peux m’appeler Eilane tu sais ! fit remarquer la Vélane. Et je te l’ai dit, je suis venue me proposer pour devenir ton alliée.
-Sans aucune arrière pensée ? demanda Harry suspicieusement.
-En fait… si…J’ai besoin de ton aide Harry, tout comme tu as besoin de la mienne !
-Je vous écoute !
-Je veux que tu m’aides à ramener Voldemort à la vie !
-Vous plaisantez j’espère ? s’étrangla Harry dont le visage déjà plus livide que d’habitude pâlit encore d’avantage.
-Pas du tout ! affirma abruptement Eilane.
-C’est impossible ! Et même si ça l’était, vous croyez vraiment que je vais accepter, après ce que votre Voldemort m’a fait ?Qu’est ce que j’aurais à y gagner en échange hein ?
-Ma puissance à ton service… et la sienne également !
-Mais bien sur… de toute façon, on ne peut pas ressusciter les morts, sinon, vous auriez pu ramener Sirius pour moi l’an dernier, je me trompe ?
-Je n’aurais pas pu ressusciter Sirius, et je ne le peux pas non plus pour Remus même si je le voudrais plus que tout au monde, mais en ce qui concerne Voldemort, c’est différent !
-Et en quoi ?
Eilane souleva ses longs cheveux et passa ses mains derrière son cou. Elle en détacha l’étrange pendentif en forme de serpent qu’elle portait depuis tant d’années et tout en maintenant le bout de sa chaîne dans sa main, elle le fit pendre à la hauteur des yeux de Harry.
-C’est Tom qui m’a donné ce pendentif, il y a bien longtemps. Il m’avait dit à l’époque qu’il contenait une "partie de lui", c’est ce qui me permettait d’entrer si facilement en contact avec lui et c’est ce qui nous permettra de le ramener du monde des morts ! Bien sur c’est en principe un acte interdit dans notre communauté, mais personne n’a jamais prétendu qu’il était impossible !
-Je ne comprends toujours pas ce que je gagnerais à accepter !
-Tu es de son côté à présent… Admets que tu ne cracherais pas sur un peu plus de soutien… Tes sujets ne sont-ils pas pour la plupart ses anciens mangemorts ? Te suivent-ils avec tout le dévouement qu’ils te doivent ? Je suis persuadée du contraire ! Ils se méfient de toi n’est-ce pas ?
Harry ne répondit pas mais Eilane savait qu’elle était dans le vrai et continua sur sa lancée.
-S’ils le voyaient te soutenir, ils accepteraient avec plus de facilité de se plier à tes exigences !
-Et pourquoi me soutiendrait-il quand il aurait de nouveau la possibilité d’avoir à nouveau le pouvoir pour lui tout seul ?
-Tu ne le sais donc pas ? Lorsqu’un être est ressuscité, celui qui lui a permis de revenir devient son maître ! Il ne pourra te faire aucun mal et il sera obligé de te suivre !
-Intéressant !
-Tu vois, tu comprends maintenant ! s’amusa la Vélane.
-Et vous, qu’est ce que ça vous apportera au juste, de transformer votre ancien amant en petit chien ?
-Je pourrais le revoir !
-Vous le voyez déjà ! fit remarquer Harry.
-On ne t’a jamais appris qu’il ne fallait pas pénétrer dans l’esprit des gens sans y être invité ? s’emporta Eilane en haussant la voix.
-Vous ne vous êtes pas gêné pour le faire avec moi un certain nombre de fois il me semble ! répliqua le jeune homme avec justesse.
Eilane ne répondit pas tout de suite… elle n’aimait pas qu’on viole son esprit sans raison… Tom avait trop souvent agit de la sorte pour avoir accès à ses pensées les plus secrètes !
-Alors ? demanda-t-elle quelques instants plus tard. Tu es d’accord ?
-Pas tout à fait ! affirma Harry et elle vit à son regard qu’il avait lui aussi des conditions à poser. En gros, vous me demandez de bafouer certaines des plus anciennes règles des sorciers pour finalement ne gagner qu’un peu de puissance en plus ? J’ai bien peur que ce ne soit pas assez !
-Demande ce que tu voudras et je te le donnerais ! proposa la Vélane, sachant qu’une telle offre ne pouvait se refuser !
-Ce que je veux ? Quoi que ce soit ? interrogea avidement Harry.
Eilane acquiesça, voyant le visage de jeune Potter s’éclairer.
-Je vous veux, vous !
-… quoi ?
Jamais elle ne se serait attendu à une telle réponse et son cœur tressaillit en l’entendant.
-C’est très simple : je ramène votre cher Voldemort à la vie, et en échange vous vous offrez à moi !
-Je ne peux pas Harry ! répliqua-t-elle la mine défaite.
-Vous aviez bien dit : tout ce que je veux ? Et voila ce que je veux ! Après, à vous de choisir, selon ce qui a le plus d’importance à vos yeux !
-Pourquoi moi ? demanda la Vélane en évitant le regard de Harry.
-Parce que je vous désire depuis que je suis entré dans l’un de vos rêves à Poudlard.
Eilane releva la tête et ses yeux de bronze croisèrent le regard émeraude de Harry.
-Tu n’étais même pas censé voir ça ! dit-elle dans un souffle.
-Peut-être bien et pourtant, je l’ai non seulement vu, mais j’y ai également participé ! Trèves de discussion, vous acceptez ou pas ?
Des larmes silencieuses glissèrent le long des joues d’Eilane, mais elle ne pouvait refuser maintenant, si près du but.
-J’accepte ! bredouilla-t-elle à voix si basse que Harry eut de la peine à comprendre sa réponse.
Un sourire traversa le visage du jeune homme qui se leva de sa chaise et s’approcha de la Vélane, posant une main sur son épaule qu’il massa doucement.
-Vous avez fait le bon choix ! s’exclama-t-il en s’abaissant à sa hauteur et en déposant un baiser dans le cou d’Eilane qui trembla au contact de ses lèvres.
-J’accepte, répéta-t-elle en sanglotant, mais pas maintenant… et pas comme ça !
-D’accord ! murmura Harry en caressant la peau de la Vélane. J’ai attendu des mois pour vous avoir… Je peux bien encore attendre un peu !
-Nous devons d’abord nous rendre là où nous pourrons ramener Voldemort à la vie !
-Et où se trouve cet endroit ? demanda Harry.
-A Poudlard ! annonça solennellement Eilane.
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Avec ce temps gris et morne, les ruines de Poudlard paraissaient encore plus sinistres que la dernière fois où Eilane s’y était rendue. Tant de choses s’était produit dans ce château qu’elle et Harry ne purent s’empêcher de réprimer une exclamation en voyant l’état de désolation dans lequel ils avaient laissé les lieux après la grande bataille qui avait eu pour terme la mort de Lord Voldemort.
-Par ici ! s’écria Eilane en courant presque, Harry loin derrière elle, sur le chemin qui menait jusqu’au puits aux âmes, jusqu’aux tombes où Tom et son fils dormaient en paix dans un sommeil infini, sommeil qu’elle et Harry allaient briser sous peu.
Pendant un instant, elle se demanda si elle avait bien fait le meilleur choix, s’il n’aurait pas mieux valut laisser Tom en paix une bonne fois pour toute, mais il était trop tard pour reculer !
Elle s’accroupit et installa les cinq bougies qu’elle avait amené avec elle tout autour de la tombe de Voldemort.
-Voila, tout est prêt ! dit-elle en se relevant. A nous de faire le reste !
Elle s’aperçut que sa voix tremblait malgré elle.
-Pas si vite ! s’exclama Harry essoufflé, qui l’avait finalement rattrapée. Je ne ferais rien tant que je n’aurais pas eu ce que vous m’avez promis !
-Ici ? s’étonna Eilane.
-Pourquoi pas ? demanda Harry en soulevant les cheveux de la Vélane et en reprenant les baisers qu’elle avait fait cesser quelques heures plus tôt.
-Ce n’est pas un bon endroit, objecta-t-elle en désignant les tombes.
-Vraiment ?Je suis sur que Voldemort aurait trouvé l’endroit plus qu’attrayant pourtant !
-Harry, non, s’il te plait ! répliqua Eilane lorsque le jeune homme posa une mains sur ses seins.
-Qu’est-ce qui vous gène exactement ? L’idée de faire l’amour avec son pire ennemi juste à côté de sa tombe ? Personnellement, ça me parait tout à fait approprié ! s’amusa Harry avec un sourire sadique. Débarrassez vous de vos vêtements maintenant ! ordonna-t-il.
Eilane savait qu’elle n’avait pas le choix. Si elle se refusait à lui maintenant, Harry ne l’aiderait pas à ramener Tom. Avec résignation, elle se déshabilla alors, sous les yeux avides du jeune homme. Une fois entièrement nue, elle l’attira à elle et entreprit de défaire sa cape, puis de déboutonner son pantalon. Harry ne disait rien, trop occupé à savourer chaque instant.
-Allonges-toi ! murmura-t-il à l’oreille de la Vélane et il lui sembla pendant un instant entendre Tom et non pas Harry.
Eilane, encore plus bouleversée qu’elle ne l’était déjà, s'étendit délicatement sur la mousse humide et glacée, juste à côté des deux tombes.
Harry s’installa à son tour, juste au dessus d’Eilane et elle sentit sa chaleur la réchauffer. Il entreprit alors d’embrasser chaque parcelle de sa peau avec une telle délectation qu’Eilane ne put s’empêcher d’en ressentir un étrange plaisir coupable. Lorsque enfin, la bouche de Harry découvrit pour la première fois l’intimité de la Vélane, elle essaya à peine de réprimer les gémissements qu’elle laissa échapper. Puis Harry revint à sa hauteur et sans lutter contre les pulsions qui s’emparait d’elle, elle l’agrippa par le sexe et le fit doucement entrer en elle, soupirant de désir et de satisfaction.
Harry avait beau manquer totalement d’expérience, il n’en était pas moins un bon amant, qui savait comment faire pour donner du plaisir à sa partenaire.
-Plus vite ! gémit Eilane alors que ses vas et viens l’emmenaient au paroxysme du contentement.
Harry ne se fit pas prier, accélérant le mouvement, sous les cris de la Vélane qui jouit quelques instants avant lui.
Une fois qu’ils eurent repris leurs esprits, Eilane et Harry se relevèrent et se rhabillèrent.
Jamais la Vélane ne s’était senti aussi mal à l’aise, aussi fautive, mais, heureusement, elle n’avait pas le temps d’évaluer son degré de culpabilité… Le rituel ne pouvait pas attendre.
Avec sa baguette magique, elle alluma les cinq bougies. Puis elle essuya sur la terre de la tombe sa main tremblante, encore maculée de la semence que Harry avait déposé en elle.
-Que le rituel commence !